Depuis le début des années 2000 et la question de la responsabilité de l’employeur vis-à-vis des problèmes posés par l’amiante, la chambre sociale a amorcé une jurisprudence trés protectrice des salariés, alourdissant les obligations de l’employeur en matière de santé et sécurité au travail des salariés.
En matière de harcèlement moral, la loi prévoir qu’aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Pour être constitué, le harcèlement ne nécessite pas nécessairement l’intention de nuire de son auteur.
Quant au harcèlement sexuel, il se trouve caractérisé par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à la dignité de la victime en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.
La règle est que le chef d’entreprise doit prévenir le harcèlement.
Il est tenu, en la matière, d’une obligation de sécurité de résultat (Cass. soc. 21-06-2006). Sauf s’il a pris les mesures de prévention conformément aux prescriptions légales, il manque à cette obligation lorsqu’un salarié est victime sur le lieu de travail d’agissements de harcèlement moral ou sexuel exercés par l’un ou l’autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris des mesures en vue de faire cesser ces agissements (Cass. soc. 3-02-2010).
Cette position était rapidement confirmée par la Cour de cassation, pour devenir la jurisprudence constante en la matière, même si très contestée pour sa sévérité.
On a depuis lors pu remarquer un assouplissement de la jurisprudence de la chambre sociale au cours des deux dernières années, jusqu’au revirement intervenu le 25 novembre 2015, où la Cour considère finalement que « ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ».
Elle laisse ainsi à l’appréciation souveraine des juges du fond le soin de déterminer si l’employeur a bien rempli toutes ses obligations en matière de sécurité et de prévention. La question se posait donc de savoir si cette solution allait également être appliquée en matière de harcèlement moral.
Un arrêt du 1er juin 2016 y répond par l’affirmative.
En l’espèce, l’employeur avait « modifié son règlement intérieur pour y insérer une procédure d’alerte en matière de harcèlement moral, [avait] mis en œuvre dès qu’il a eu connaissance du conflit personnel du salarié avec son supérieur hiérarchique immédiat une enquête interne sur la réalité des faits, une réunion de médiation avec le médecin du travail, le directeur des ressources humaines et trois membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail en prenant la décision au cours de cette réunion d’organiser une mission de médiation pendant trois mois entre les deux salariés en cause confiée au directeur des ressources humaines ».
Cette solution paraît plutôt équitable. Elle permet aux employeurs diligents de s’exonérer de leur responsabilité en cas de harcèlement moral mais à la condition qu’ils aient tout fait pour en prévenir toutes les formes.
Va inévitablement se poser la question de savoir si l’employeur a pris les mesures nécessaires et suffisantes en vertu de son obligation de sécurité de résultat, la définition d’une telle mesure n’existant pas.
Cela risque d’entrainer une interprétation à géométrie variable des juges, où en matières sociale, des conseillers, en fonction de la composition de la juridiction saisie.