L’employeur peut sanctionner par un licenciement un acte du salarié qu’il considère comme fautif. Il doit s’agir d’un comportement volontaire : à défaut, l’employeur ne saurait se placer sur le terrain disciplinaire.
Il s’agit en général d’un manquement aux obligations découlant du contrat de travail (travail consciencieux, respect des directives de l’employeur en matière d’horaire, de discipline, d’hygiène et de sécurité, obligations de loyauté et de discrétion).
La faute ne doit pas être prescrite ni avoir déjà été sanctionnée.
L’employeur peut, le cas échéant, être tenu par une clause du règlement intérieur ou par une disposition conventionnelle limitant les motifs de licenciement pour faute ou le subordonnant au respect de certaines conditions.
Selon sa gravité, la faute commise par le salarié emporte des conséquences plus ou moins importantes. Elle ne justifie pas son licenciement si elle n’est pas sérieuse. Plusieurs griefs, chacun insuffisant pour justifier un licenciement, peuvent, conjugués, constituer une cause réelle et sérieuse. L’accumulation de griefs ne saurait toutefois pallier leur inconsistance.
Depuis une jurisprudence du 27 septembre 2007, la faute grave est celle qui « rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ». Elle entraîne la perte du droit aux indemnités de préavis et de licenciement.
L’interprétation de la gravité de la faute étant laissé au juge, c’est la jurisprudence qui définit les contours de cette matière.
Dans le cas visé, dont l’arrêt de la Cour de cassation fut rendu le 5 juillet 2017, la Haute Cour abandonne la théorie du dommage nécessaire.
En l’espèce, une salariée, chef d’équipe référent cynophile dans une entreprise de sécurité, avait, pendant une période de congés payés, exercé les mêmes fonctions pour une entreprise concurrente.
Elle avait été licenciée pour faute grave, l’employeur invoquant la violation de l’obligation de loyauté de la salariée, dont on sait qu’elle subsiste même pendant les périodes de suspension du contrat. Elle saisit alors le juge, sans toutefois obtenir gain de cause en appel. Elle forma donc un pourvoi en soutenant que « l’exercice d’une activité professionnelle pour le compte d’une entreprise concurrente, au cours d’une période de congés payés, ne [peut] constituer une faute grave que s’il cause un préjudice à l’employeur ».
Ce pourvoi est rejeté par la cour régulatrice au motif que la cour d’appel, ayant retenu que la salariée « avait manqué à son obligation de loyauté en fournissant à une société concurrente, par son travail, les moyens de concurrencer son employeur, a pu en déduire, sans avoir à caractériser l’existence d’un préjudice particulier subi par l’employeur, que ces agissements étaient d’une gravité telle qu’ils rendaient impossible le maintien de l’intéressée dans l’entreprise ».
La Cour de cassation confirme donc que la caractérisation d’un préjudice de l’employeur n’est pas une condition de la faute grave.
Dans une autre affaire déjà, il était reproché au salarié d’une banque des détournements. Il se plaignait de ce que les juges du fond avaient statué sans vérifier si la banque avait subi un dommage, qu’ils avaient à bon droit considéré que les agissements du salarié « constituaient une faute grave privative des indemnités de rupture sans qu’il soit nécessaire que cette faute ait causé un préjudice à la banque».
Mais il suffit que la faute soit de nature à nuire à l’entreprise. Ainsi, il n’est pas nécessaire que le préjudice se soit déjà réalisé puisque le licenciement pour faute grave a aussi pour fonction d’empêcher la réalisation d’un préjudice ultérieur.
En contrepartie, l’acte commis doit alors, par lui-même, revêtir une certaine gravité. La Cour de cassation est, à cet égard, particulièrement sévère en ce qui concerne la violation de l’obligation de loyauté, et notamment de l’obligation de non-concurrence.
Comme le souligne les jurisprudences évoquées, elle interdit par exemple toute activité concurrentielle à un salarié dont le contrat est suspendu pour maladie.
Cela étant, il serait inexact d’affirmer que le préjudice est toujours indifférent à la caractérisation de la faute grave. En effet, il demeure parfois toujours nécessaire de caractériser la faute, son degré de gravité mais aussi le préjudice causé à l’employeur. C’est la démonstration du célèbre arrêt Genovese du 16 juin 1998 qui absout un salarié ayant pourtant profité d’un arrêt maladie pour effectuer un voyage d’agrément à l’étranger, mais à qui aucun acte de concurrence déloyale ne pouvait être reproché.
Cette position de la Cour de cassation semble pour le moins logique et cohérente, tant ce qui est reproché au salarié c’est l’inobservation d’une obligation élémentaire (obligation de loyauté), inhérente à son contrat de travail. Cette obligation d’ordre public s’impose et dont le manquement peut être sanctionnée, même si elle n’entraîne pas un préjudice direct à l’employeur. Encore que dans le cas d’espèce évoqué, la concurrence déloyale emporte nécessairement un préjudice à l’entreprise, bien que difficilement quantifiable.