Le cadre juridique du télétravail est modifié
(Ord. 2017-1387 du 22-9-2017 art. 21 et 40)
La définition du télétravail, ses modalités de mise en place, celles de passage à cette forme d’organisation du travail et le statut du télétravailleur ont été adaptés à l’évolution du télétravail afin d’en favoriser le recours.
Reprenant certaines préconisations du rapport conjoint des partenaires sociaux remis le 7 juin 2017 à la ministre du travail à l’issue de la concertation sur le développement du télétravail et du travail à distance organisée par la loi du 8 août 2016, l’article 21 de l’ordonnance du 22 septembre 2017 adapte les articles L 1222-9 à L 1222-11 du Code du travail à l’évolution du télétravail, afin de favoriser le recours à celui-ci.
Ces dispositions s’appliquent depuis le 24 septembre 2017, lendemain de la publication de l’ordonnance au Journal officiel.
Les modifications apportées par l’ordonnance aux articles L 1222-9 et L 1222-11 du Code du travail affectent le cadre juridique du télétravail pour les entreprises placées dans le champ d’application de l’accord national interprofessionnel (ANI) sur le télétravail du 19 juillet 2005 étendu par arrêté du 30 mai 2006 et modifié par arrêté du 15 juin 2006. Sont concernées par cet accord toutes les entreprises appartenant à un secteur professionnel représenté par les organisations patronales signataires : le Medef, la CPME (ex-CGPME) et l’ancienne UPA.
Le télétravail peut être régulier ou occasionnel
L’exigence d’un télétravail régulier disparaît de la définition du télétravail. Il désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication (C. trav. art. L 1222-9).
Est qualifié de télétravailleur tout salarié de l’entreprise qui effectue soit dès l’embauche, soit ultérieurement du télétravail tel que défini ci-dessus.
Sauf en cas de recours occasionnel, le télétravail est mis en place par accord collectif ou charte
La loi n’impose plus la mise en place du télétravail dans le cadre d’un contrat de travail ou d’un avenant à ce contrat. Il doit désormais être mis en place dans le cadre d’un accord collectif ou, à défaut, d’une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe.
Ce texte doit préciser :
- les conditions de passage en télétravail et de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail ;
- les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail ;
- les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail ;
- la détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié.
Pour les salariés dont le contrat de travail conclu avant le 23 septembre 2017 contient des stipulations relatives au télétravail, les dispositions de l’accord ou de la charte se substituent, s’il y a lieu, aux clauses du contrat contraires ou incompatibles, sauf refus du salarié. Dans ce dernier cas, le salarié doit faire connaître son refus à l’employeur dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle l’accord ou la charte a été communiqué dans l’entreprise.
En l’absence de charte ou d’accord collectif, lorsque le salarié et l’employeur conviennent de recourir de manière occasionnelle au télétravail, ils formalisent leur accord par tout moyen.
Le refus d’accorder le bénéfice du télétravail à certains salariés doit être motivé
L’employeur peut refuser d’accorder le bénéfice du télétravail à un salarié qui le lui demande. Toutefois, si ce salarié occupe un poste éligible à un mode d’organisation en télétravail dans les conditions prévues par accord collectif ou, à défaut, par la charte, l’employeur doit motiver sa réponse.
A l’inverse, l’employeur peut proposer un passage en télétravail à ses salariés mais le refus d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas un motif de rupture du contrat de travail.
Seule entorse au principe du volontariat déjà prévue par la loi : en cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection du salarié.
Le télétravailleur a les mêmes droits que les salariés travaillant dans les locaux de l’entreprise
La loi précise désormais que le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise, notamment en ce qui concerne l’accès aux informations syndicales, la participation aux élections professionnelles et l’accès à la formation.
Outre ses obligations de droit commun, vis-à-vis des salariés, l’employeur reste tenu à l’égard du télétravailleur :
- de l’informer de toute restriction à l’usage d’équipements ou outils informatiques ou de services de communication électronique et des sanctions en cas de non-respect de telles restrictions ;
- de lui donner priorité pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail correspondant à ses qualifications et compétences professionnelles et de porter à sa connaissance la disponibilité de tout poste de cette nature ;
- d’organiser chaque année un entretien portant notamment sur ses conditions d’activité et sa charge de travail.
En revanche, la loi ne prévoit plus qu’il doit :
- prendre en charge tous les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail, notamment le coût des matériels, logiciels, abonnements, communications et outils ainsi que de la maintenance de ceux-ci. Cette obligation a disparu de l’article L 1222-10 du Code du travail ;
- fixer, en concertation avec le télétravailleur, les plages horaires durant lesquelles il peut habituellement le contacter, la détermination de ces plages horaires étant désormais définie par l’accord collectif ou, à défaut, la charte permettant la mise en place du télétravail.
La question se pose de savoir si la prise en charge des coûts peut être librement résolue par l’accord collectif ou la charte élaborée par l’employeur pour mettre en place le télétravail. En effet, d’une part, l’article L 1222-9 du Code du travail prévoit, comme auparavant, l’application des dispositions qu’il énonce « sans préjudice de l’application, s’il y a lieu, des dispositions du présent Code protégeant les travailleurs à domicile ». Or ces derniers ont droit à la prise en charge de leurs frais d’ateliers (valeur des matières premières et fournitures accessoires, loyer, chauffage, éclairage du local notamment). D’autre part, l’obligation de prise en charge des frais professionnels est prévue, sans restriction, par la jurisprudence et celle-ci, de portée générale, couvre les salariés en situation de télétravail.