L’article 9 du code civil pose le principe du droit pour chacun au respect de sa vie privée.
Les articles 8 de la convention européenne des droits de l’homme et L.1121-1 du code du travail précisent que ce droit existe même au temps et sur leur lieu de travail.
Cela implique notamment le respect du secret des correspondances.
Il est délicat de trouver le juste équilibre entre le respect dû à la vie privée du salarié sur son lieu de travail et la nécessité de contrôler l’usage des outils que l’employeur met à sa disposition.
Concernant une jurisprudence « Nikon France » de 2001, le juge interdisait de « prendre connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail, et ceci même au cas où l’employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l’ordinateur ».
Un peu plus de 10 ans plus tard, un renversement de la jurisprudence était opéré par la Cour de cassation.
Concernant une affaire jugée en 2013, une société avait assigné devant la juridiction civile un de ses anciens salariés ainsi que son nouvel employeur pour détournement de clientèle et concurrence déloyale pendant l’exécution du préavis de ce salarié.
La pièce essentielle sur laquelle reposaient les demandes de l’ancien employeur était un procès-verbal de constat d’huissier de Justice, intervenu à l’initiative exclusive de l’employeur, qui s’était connecté à la boîte mail utilisée par son ancien salarié, l’avait consulté et en avait édité des copies.
Se posait alors la question de savoir si l’employeur avait le droit de consulter la boite mail du salarié puis ensuite de se prévaloir de mails reçus et/ou envoyés par lui lors d’une instance judiciaire.
En effet, si le salarié utilisait cette messagerie dans un cadre professionnel, il y recevait également des messages personnels, protégés par le secret des correspondances et le droit au respect de la vie privée.
Le nouveau principe posé par les juges
La Cour de cassation, lors d’un renversement de jurisprudence remarquée, a annulé la décision d’appel et affirmé comme principe que :
« Les courriels adressés et reçus par le salarié à l’aide de l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel en sorte que l’employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l’intéressé, sauf si le salarié les identifie comme personnels. » (Cass. Soc., 16 mai 2013)
Cela signifie que les fichiers et courriers édités, adressés et/ou reçus par un salarié à l’aide de l’outil informatique mis à leur disposition par leur employeur, pour les besoins de leur travail, sont présumés avoir un caractère professionnel.
Et que l’employeur est donc en droit d’en prendre connaissance.
L’accès aux messages du salarié et la consultation de sa messagerie peuvent ainsi avoir lieu sans son accord et sans autorisation judiciaire.
La limite au principe
Ce droit n’est pas remis en cause lorsque la boîte de réception comporte des messages dont l’objet est personnel ou professionnel.
Un huissier de justice peut alors parfaitement s’introduire et accéder au boites de messagerie professionnelle des salariés afin de recueillir les éventuels éléments de preuve dont pourra avoir besoin leur employeur dans le cadre d’une procédure judiciaire ou d’une procédure disciplinaire, à condition que le salarié n’ai pas identifié les emails comme étant personnels dans leur intitulé.
Si l’objet du message laisse clairement apparaître que la correspondance est privée, l’usage du mail contre le salarié sera prohibé.
Cette jurisprudence illustre bien l’importance d’être assister d’un bon conseil et de faire réaliser un constat d’huissier de justice exempt de vice en cette matière.